Une grève c’est beaucoup de travail…

Dur dur trois semaines de grève. Giovanni Salvagnin, des Ateliers CFF de Bellinzone, témoigne.

 Giovanni
Giovanni Salvagnin. Photo AC

 

« Moi c’est Salvagnin. Oui, c’est ça, Salvagnin comme le vin. J’ai 58 ans. Cela fait 34 ans que je travaille ici dans les Ateliers de Bellinzone. Je suis mécanicien de précision, marié, deux fils adultes. Ils se subviennent à eux-mêmes. Heureusement ! Mais pour mes collègues qui ont encore des enfants à la maison et qui ne savent pas s’ils vont perdre leur place de travail ou pas, c’est une autre chanson. Il y a pile une année, l’ancien directeur de CFF Cargo, Daniel Nordmann, est venu ici pour nous dire que les Ateliers de Bellinzone étaient rentables. Douze mois plus tard, on nous dit que nous sommes trop chers. Les CFF veulent privatiser le secteur de l’entretien des wagons et transférer à Yverdon-les-Bains l’entretien des locomotives. Ils nous prennent pour des pions. C’est légitime que nous nous soyons mis en grève. Nous ne faisons pas la grève pour le plaisir. Nous faisons la grève parce que nous voulons continuer à travailler dans nos Ateliers. Je trouve que l’organisation de cette grève est exemplaire. Je ne m’attendais pas à ce que l’on reçoive un appui si fort de la part de la population. Nous faisons plus d’heures de présence aux Ateliers durant la grève que lorsqu’on y travaillait… A la maison, je broie du noir ; ici, entre collègues, on se remonte le moral. Nous voulons gagner cette lutte. On ne reste pas sans rien faire, on va distribuer des tracts dans les villages pour expliquer le pourquoi de notre grève, on nettoie les Ateliers, on accueille les visiteurs. Des collègues font à manger. Il y a des épouses de collègues qui viennent nous donner un coup de main. Lors des manifestations qui ont eu lieu à Fribourg, Berne ou Bellinzone, nous avons organisé notre propre service d’ordre. Non, faut pas nous prendre pour une bande de rigolos qui croisent les bras pour le plaisir. Nous sommes des gens sérieux et responsables qui défendons notre place de travail. Regarde mes mains. Tu as vu ? J’ai perdu un doigt ici. Un accident de travail. Ces ateliers c’est ma vie ! »

 

Extrait de l’article paru dans L’Evénement syndical, avril 2008.